En amont des listes d’épicerie des divers candidats à la mairie ou à titre de conseiller municipal et comportant de multiples projets d’investissements, il est primordial que les nouveaux membres du conseil municipal se penchent en priorité sur l’identité de cette ville et sur son devenir.
Le Haut-Saguenay : un territoire magnifique, une population fière d’y demeurer, des institutions plus que centenaires dans les domaines de la santé, de la justice, de l’éducation, de la culture et des sports, des entrepreneurs et professionnels compétents qui ne demandent pas mieux que de participer au développement de leur milieu, des grosses entreprises qui ont participé au développement démographique et économique pendant trois quarts de siècle avant de s’essouffler.
Au cœur de cette sous-région on a eu l’idée de fusionner, en 2002, sept municipalités emportées par la vague des fusions sur tout le Québec pour des raisons « d’efficacité » et « d’économie d’échelle ». Or, actuellement, elles n’ont de commun que le nom et encore, un nom non partagé et non significatif. Une ville atypique et dysfonctionnelle parmi toutes les villes de 100 000 habitants et plus au Québec. Il est essentiel et urgent de repenser cette ville qui, sous sa forme actuelle, est non viable socialement et économiquement.
Atypique, cette ville? En voici des exemples.
- Avec une superficie de plus de 1 165 km2, cette ville est trois fois plus étendue que n’importe laquelle des autres villes incluant Montréal. Une ville comme Gatineau, par exemple, n’a que 400 km2 pour une population deux fois plus importante que Saguenay. Lévis compte 301 habitants par km2 soit trois fois plus que Saguenay. Conséquence : 13% seulement du territoire est urbain. Pourquoi cette démesure?
- Saguenay est la seule ville qui ne porte pas le nom d’une des villes fusionnées et la seule qui a opté pour une consultation populaire qui soit dit en passant fut bidon parce non précédée d’un processus de consultation approprié pour le choix d’un toponyme. La Commission de toponymie du Québec avait même ridiculisé l’utilisation du nom Saguenay pour désigner le nom de cette ville, mais le comité de transition et les nouveaux élus de la ville ont fait la sourde oreille pour accepter un résultat qui ressemble davantage à un lynchage qu’à une décision réfléchie, à savoir, qu’il aurait été logique de choisir un nom distinctif, significatif et porteur de notre mémoire collective. Les conséquences se font sentir lorsqu’il s’agit de faire sa promotion. Pourquoi ne pas y réfléchir à nouveau?
- Saguenay est la seule ville de plus de 50 000 habitants au Québec qui a vu sa population baisser depuis la fusion? Classée 6e ville du Québec en 2002, la voilà maintenant au 8e rang et talonnée de près par Trois-Rivières. Pourquoi en sommes-nous rendus là?
- Saguenay est la seule ville qui possède encore cinq centres-villes dont trois à Jonquière. « Quartier le plus animé ou le plus ancien », « Centre de la ville où se trouvent les principaux bâtiments administratifs, les lieux de culte et les magasins importants », voilà ce qui décrit un centre-ville. Dans son dernier schéma d’aménagement, Saguenay se base sur onze critères pour identifier le centre-ville. Résultat: elle en garde trois! Pourquoi un tel tricotage alors que l’évidence saute aux yeux?
Dysfonctionnelle cette ville? Voilà pourquoi:
- Après 20 ans, les élus de cette ville n’ont pas encore régularisé la répartition démocratique et démographique des districts. L’arrondissement de Chicoutimi est déficitaire d’un district et celui de La Baie en a un de trop. Il est temps de régler ce dossier.
- Le développement économique est dans les mains de Promotion Saguenay, un organisme aux multiples fonctions, qui est responsable du développement commercial, industriel et touristique, tout en étant l’opérateur des Navettes Maritimes du Fjord, du Quai d’escale des bateaux de croisière, de l’Aérogare de Bagotville et j’en passe. Recette idéale pour un échec! Particulièrement dans le domaine du développement industriel. D’autres villes ont opté pour une organisation différente et ce avec succès. Il est temps de régler ce dossier.
- Le transport en commun! Bête noire de la plupart des villes au Québec. Certaines d’entre elles ont trouvé des solutions pour amoindrir l’impact financier sur la trésorerie de leur ville. Qu’attend-on ici pour faire de même?
- La chasse aux projets! La ville stagne, la ville vieillit, la ville se détériore depuis 20 ans et on passe le plus clair de notre temps à parler et à se crêper le chignon pour des projets d’investissements dans des domaines qui ne sont pas ceux qui portent sur les responsabilités premières d’une ville que sont, entre autres, l’entretien des routes et des infrastructures pour la disposition des eaux usées et des détritus. Un effort louable a été fait au cours des trois dernières années mais nettement insuffisant. À quand un plan d’investissement cohérent dont les priorités sont avant tout basées sur les besoins essentiels des citoyens?
- La ville a développé ou participé à développer, au cours des dernières années, deux zones industrielles importantes soit celle de Port Saguenay et celle de l’Aérogare de Bagotville. Ces zones sont inutilisées et on vient de décider de créer une nouvelle zone pour accommoder « des entreprises qui produisent et/ou utilisent des biocarburants biologiques ». Cette décision de la localiser en pleine zone agricole et de villégiature a été prise sans avoir au préalable étudié les autres possibilités qui s’offraient à la ville. Quand allons-nous arrêter de prendre des décisions basées sur le lobby de certaines entreprises?
- Alors que les autres villes se contentent d’un bureau touristique, la Ville de Saguenay en possède quatre. Conséquence: dispersion et multiplication du personnel alors que les touristes utilisent maintenant les moteurs de recherches pour localiser les endroits touristiques d’intérêt. Pourquoi ne pas utiliser cet argent pour doter les autobus et les lieux touristiques de systèmes multi-langues (à Barcelone les touristes profitent de 16 langues différentes) pour la description des lieux et de notre histoire?
- Et que dire du schéma d’aménagement du territoire! Aucun progrès depuis sa première version préparée à partir du schéma de l’ancienne MRC du Fjord à laquelle appartenaient les municipalités avant la fusion. La Ville est 20 ans en retard sur les autres villes telles Gatineau dont le schéma d’aménagement servira de base pour les 30 prochaines années. Pourquoi s’est-on contenté de si peu, pourquoi n’a-t-on pas considéré sérieusement la préparation du plan d’aménagement pour bâtir durablement cette ville?
Les élus municipaux qui se sont succédé ont été essentiellement des gestionnaires qui ont rationnalisé l’administration municipale en fusionnant les départements de services (Sûreté, Sécurité, Comptabilité, Ressources humaines, Techniques, etc.) plutôt que de la « gouverner ». Oui, assumer une bonne gouvernance dans le sens d’aller plus loin que d’assurer une bonne gestion, soit, comme le souligne le ministère des Affaires municipales, « de prendre les décisions sur les orientations et les priorités d’action de la municipalité ». Au contraire, on s’est contenté, comme le prouve le schéma d’aménagement et de développement de la ville, d’agir comme si cette fusion n’avait pas eu lieu.
Il est temps que chaque conseiller municipal se comporte en adulte et que l’ensemble du conseil définisse, au moins pour commencer, parce que rien ne peut être figé, les principes de base qui devraient les guider à un réaménagement cohérent du territoire, incluant remettre en question la pertinence de la grandeur du territoire, du nom de la ville, des arrondissements et du nombre de districts. Une sérieuse réflexion est nécessaire en ce qui concerne la façon d’aborder le développement économique, l’environnement, le transport en commun, l’étalement urbain, le patrimoine bâti et virtuel, dont le nom des rues et j’en passe. En somme, savoir où on s’en va parce que présentement on ne va nulle part. La consultation auprès d’experts est essentielle.
Mais au préalable et tel que déjà proposé dans un autre communiqué, les membres du conseil devrait tenir « un lac à l’Épaule » où chacun devra expliquer sa vision personnelle du devenir de cette ville en commençant par en identifier les forces et les faiblesses. Cela leur permettra de constater s’ils arrivent à un diagnostic différent. Souvent la mésentente entre les élus quant à l’état de la situation est la principale cause d’une confrontation sur les sujets à prioriser. Lors d’un autre « lac à l’Épaule », les moyens à prendre pour réaliser les priorités devront être abordés. La tâche est très lourde et ce dont je parle est un processus qui peut exiger plusieurs séances de travail se prolongeant sur plusieurs mois et le recours à des experts pour nous aider à y voir clair. Un moratoire sur toutes les actions ayant des conséquences à long terme devrait être décrété jusqu’à la conclusion de ce processus. Il faut éviter un dialogue de sourds entre les membres du conseil municipal.
Comment peut-on renverser la vapeur de cette maudite fusion malsaine incohérente,,,,,,cette grande ville ne fera jamais l’unanimité sur ce trop grand territoire,,,,,l’esprit de clocher est encore trop profond pour qu’il y ait une justice acceptable,,,,,
Allô Jacques,
Ton article est excellent, et rejoint parfaitement ma pensée, que ce soit les constats et les suggestions que tu proposes. — Comme tu sembles le dire, je n’ai pas une très bonne opinion sur le futur, au point que je suis de plus en plus triste de vivre dans ma ville.
Bravo pour ton implication.
Salutation, excellent texte. J’ai confiance en Mireille Jean mais je ne crois pas qu’ils vont lui laisser une marge de manœuvre. J’ai hâte de voir.